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L a   p r o d u c t i o n : 
du capitalisme au communisme libertaire
Ce texte est extrait d'un article de Carlo Cafiero
publié en 1880 dans “Le révolté” de Genève

La concurrence, la lutte est un des principes fondamentaux de la production capitaliste, qui a pour devise : Mors tua vita mea, ta mort est ma vie. La ruine de l’un fait la fortune de l’autre. Et cette lutte acharnée se fait de nation à nation,
de région à région, d’individu à individu, entre travailleurs aussi bien qu’entre capitalistes. C’est une guerre au couteau, un combat sous toutes les formes : corps à corps, par bandes, par escouades, par régiments, par corps d’armée. Un ouvrier trouve de l’ouvrage où un autre en perd ; une industrie ou plusieurs industries prospèrent, lorsque telles ou telles industries périclitent.

Eh bien ! imaginez-vous lorsque, dans la société future, ce principe individualiste de la production capitaliste, chacun pour soi et contre tous, et tous contre chacun, sera remplacé par le vrai principe de la sociabilité humaine : chacun pour tous et tous pour chacun - quel immense changement n’obtiendra-t-on pas dans les résultats de la production ?
Imaginez-vous quelle sera l’augmentation de la production, lorsque chaque homme, loin d’avoir à lutter contre tous les autres, sera aidé par eux, quand il les aura, non plus comme ennemis, mais comme coopérateurs. Si le travail collectif de dix hommes atteint des résultats absolument impossibles pour un homme isolé, combien grands seront les résultats obtenus par la grande coopération de tous les hommes qui, aujourd’hui, travaillent hostilement les uns contre les autres ?

Et les machines ? L’apparition de ces puissants auxiliaires du travail, si grande qu’elle nous paraisse aujourd’hui, n’est que très minime en comparaison de ce qu’elle sera dans la société à venir.

La machine a contre elle, aujourd’hui, souvent l’ignorance du capitaliste, mais plus souvent encore son intérêt.
Combien de machines restent inappliquées uniquement parce quelles ne rapportent pas un bénéfice immédiat au capitaliste ?

Est-ce qu’une compagnie houillère, par exemple, ira se mettre en frais pour sauvegarder les intérêts des ouvriers et construira de coûteux appareils pour descendre les mineurs dans les puits ? Est-ce que la municipalité introduira une
machine pour casser les pierres, lorsque ce travail lui fournit le moyen de faire à bon marché de l’aumône aux affamés ? Que de découvertes, que d’applications de la science restent lettre morte, uniquement parce qu’elles ne rapporteraient pas assez au capitaliste !

Le travailleur lui-même est aujourd’hui l’ennemi des machines, et ceci avec raison, puisqu’elles sont vis-à-vis de lui le monstre qui vient le chasser de l’usine, l’affamer, le dégrader, le torturer, l’écraser. Et quel immense intérêt il aura, au contraire, à en augmenter le nombre lorsqu’il ne sera plus au service des machines ; au contraire, elles-mêmes seront à son service, l’aidant et travaillant pour son bien-être !

Enfin, il faut tenir compte de l’immense économie qui sera faite sur les trois éléments du travail : la force, les instruments et la matière, qui sont horriblement gaspillés aujourd’hui, puisqu’on les emploie à la production de choses absolument inutiles, quand elles ne sont pas nuisibles à l’humanité.

Combien de travailleurs, combien de matières et combien d’instruments de travail ne sont-ils pas employés aujourd’hui par l’armée de terre et de mer, pour construire les navires, les forteresses, les canons et tous ces arsenaux d’armes offensives et défensives ! Combien de ces forces sont usées à produire des objets de luxe qui ne servent qu’à satisfaire des besoins de vanité et de corruption !

Et lorsque toute cette force, toutes ces matières, tous ces instruments de travail seront employés à l’industrie, à la production d’objets qui eux-mêmes serviront à produire, quelle prodigieuse augmentation de la production ne verrons-nous pas surgir !

L'esclavage aboli ? (Nono, 1998)

La version complète est disponible, sous le titre “Anarchie et communisme”.

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